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Publié le 22/03/12


Exposition de Jacques Bruel

Evènement passé.

Du 29 mars au 27 avril 2012 à Nîmes (30).

En organisant cette exposition, nous avons souhaité rendre hommage à Jacques Bruel, récemment disparu (1948-2010). L'Ecole Supérieure des Beaux Arts de Nîmes a eu en effet à plusieurs reprises le privilège de travailler avec cet artiste trop confidentiel :



- En mars 1991, ce fut à l'occasion de l'exposition collective Monnaie de singe, une initiative de Christian Besson.
- En 2003, il fut invité par Dominique Gutherz, dans le cadre d'une résidence, à partager les galeries de l'Hôtel-Rivet avec Frédéric Di Martino. Sa proposition s'intitulait La règle du jeu- La grande illusion. Prélude & Fugue.
- Enfin, en 2007, il accepta avec générosité d'intervenir dans l'exposition Objectif Lunel, qui eu lieu dans la salle Louis Feuillade / Abric à Lunel. Cette exposition fut montée par les étudiants de l'ESBAN, à partir d'oeuvres empruntées à la collection du FRAC Languedoc- Roussillon.



LA COUPURE DU MONDE
"Jacques Bruel aura été l'un de ces « rêveurs » du monde qui paraissent en posséder une conscience si aiguë qu'elle les conduit sans cesse aux points où celui-ci manifeste sa coupure. A partir de 1981, J. Bruel voyage en Afrique, au Cameroun d'abord, puis, à partir de 1983 au Bénin, où il commence à récupérer la partie supérieure des jerrycans que les populations ont découpés pour ne conserver que le corps de l'objet comme récipient à eau. Recevant ces « restes » comme un « don » (Bruel), l'artiste les présente autant comme des objets d'art que comme des symboles de la coupure entre le Nord et le Sud : « La coupure du monde : cette coupure entre l'utile et l'agréable, entre le Sud et le Nord n'est donc pas de ma main et j'aime l'idée ' pour une fois au moins ' que cette coupure fasse coïncider très exactement le Nord avec le Sud », écrit-il en 1990.



Pour une fois au moins ! Ce pessimisme lucide appartient à ceux qui n'abdiquent jamais face à la séparation des catégories, des fonctions, à la division des êtres, des cultures, et qui se battent jusqu'au bout contre les « coupures » de toutes sortes. Dès 1983, il avait proposé avec son Exercice de style Louis XVI - consistant en la fabrication d'un animal hybride avec une harpe-cithare du Karsiki (Cameroun) et une table Louis XVI (et des grains de café !) -, une première coïncidence des cultures, très ironique il est vrai. Après les « masques pur-purs » glanés en Afrique tout au long des années 1980, Jacques Bruel collecte dans les rues de Paris, à partir du début des années 1990, les rouleaux de tissus placés par les balayeurs de la Ville dans les caniveaux, pour mieux diriger l'eau depuis la bouche de lavage jusque vers l'égout. Redressés par lui et comme soclés, ces « Moïses », sont pour lui l'évidente manifestation d'une coïncidence des pratiques d'irrigation et de conservation de l'eau en Afrique et d'une technique de nettoyage dans l'une des capitales du monde chrétien'

Comment ne pas voir alors dans ces « Moïses » la « coupure-qui-fait-coïncider » dont l'artiste avait reçu une première fois le don dans l'autre hémisphère ? Pour deux fois au moins ! Une redite qui n'en est pas une, si l'on considère que c'est dans l'hémisphère même de l'esthétique qu'au travers de ces rouleaux de moquette vite emmaillotés, se fit cette fois la démonstration, l'une des plus sèches que l'art du Nord ait eu à enregistrer à la fin du siècle dernier : l'utile (affirmé deux fois) n'y perdait pas un pouce face à l'agréable, l'économique (comme Loi primordiale des inventions humaines) ne versait pas une larme sur le symbolique, l'attention à l'absolue précarité de l'Etre ne se prenait pas les pieds dans le tapis artistique de la charité bien ordonnée'

En somme, le Sud récupérait l'honneur de ses Fils exilés ! En 2007, Jacques Bruel m'adressait un courrier consistant en quelques feuilles pliées en deux sur lesquelles il avait écrit ses idées. Sur l'une d'elle, il avait dessiné un livre portant sur sa couverture : « La coupure du monde, par Emmanuel Latreille, nrf ». Et en commentaire : « Pourquoi ne procèderions-nous pas à une Inversion des pôles ? ». Pour trois fois au moins !" (Emmanuel Latreille).

Exposition de Jacques Bruel
du 29 mars au 27 avril 2012
Ecole Supérieure des Beaux-Arts
Hôtel Rivet
10 Grand'Rue
30000 Nîmes

Tél. 04 66 76 70 22



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